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Rassemblement pour la liberté des détenu.es

Le régime Assad, en même temps qu’il écrase dès 2011 des manifestations non violentes, s’emploie depuis avec méthode à instaurer au sein de la population syrienne un sentiment de terreur pour interdire toute forme de protestation. Outre les assassinats massifs, les « disparitions » constituent tout autant un élément central de sa politique répressive, plongeant les proches des victimes dans la douleur et l’incertitude.

Des dizaines de milliers de personnes persécutées languissent dans des centres de détention et il n’existe encore aucun mécanisme fiable permettant aux familles d’apprendre ce qui est arrivé à leurs proches ni de connaître où ils se trouvent.

Pourtant, l’Assemblée générale de l’ONU a créé le 29 juin 2023 une «institution indépendante» pour «clarifier» le sort des milliers de personnes disparues en Syrie depuis plus de 12 ans.

Tableau de l’artiste syrien Hassan Abu-Shaker

Dans le cadre de cette semaine des détenu.es organisée par l’Union des Coordinations de Syriens à Travers le Monde, le collectif des Femmes Syriennes pour la Démocratie organise un rassemblement 

le samedi 20 janvier 2024 de 15h00 à 16h00

à Genève devant le Palais Wilson (Haut Commissariat pour les Droits Humains), côté lac.

Nous demandons que la lumière soit faite sur le sort des disparu.es et des détenu.es et nous exigeons leur libération!

Venez nombreux vous joindre à nous pour qu’enfin leur voix soit entendue!

Apportez avec vous, si possible, des photos de détenu.es et disparu.es en Syrie et les drapeaux de la révolution.

Avec le soutien de l’Union des Coordinations de Syriens à Travers le Monde, alencontre.org

Le Veto sur les Questions Humanitaires Doit Être Aboli

Lettre ouverte à I. Cassis, conseiller fédéral et chef du DFAE:

La Suisse, membre et co-porteplume humanitaire du dossier syrien au sein du Conseil de Sécurité, doit agir en toute urgence pour libérer la question humanitaire du chantage politique.

Dans le nord-ouest syrien lors d’une manifestation le 17.07.2023

Monsieur le Conseiller fédéral, chef du DFAE,

Le 02.02.2023, notre collectif vous a adressé une lettre co-signée par plusieurs organisations inquiètes de la situation humanitaire dans le nord-ouest syrien ainsi que par une soixantaine de membres de la diaspora syrienne en Suisse. Dans cette lettre nous vous demandions d’oeuvrer pour que la question de l’aide humanitaire et des passages d’acheminement transfrontaliers vers la Syrie soit confiée à l’Assemblée Générale de l’ONU, loin du Conseil de Sécurité et de ses droits de veto, ceci pour donner à l’Assemblée Générale les moyens indispensables pour acheminer l’aide humanitaire aux personnes dans le besoin qui y ont droit. Votre réponse du 24.03.2023 affirmait simplement le besoin d’une résolution du Conseil de Sécurité pour que ces passages transfrontaliers soient fonctionnels. 

Depuis le récent veto russe du 11 juillet, nos craintes exprimées dans notre dernière lettre concernant la continuité de l’aide humanitaire pour plus de quatre millions de civils sont devenues réalité et c’est insoutenable pour cette population prise au piège et pour tous les syrien.nes touché.es par cette catastrophe.

Pourtant les organisations des droits humains affirment que cette situation est contraire à la loi internationale humanitaire et considèrent qu’il est honteux que « la diplomatie internationale fasse passer la politique avant les intérêts humains », comme le déclare Marc Schakal, responsable des programmes de MSF au Proche et Moyen-Orient. 

Suite à ce veto, le régime syrien vient d’informer l’ONU de son intention de donner son autorisation pour que l’aide humanitaire passe par Bab al-Hawa pendant six mois! Il est évident que ce n’est qu’une ruse de plus de la part de ce régime criminel pour préparer son retour dans le monde international suite à sa réintégration récente et honteuse dans le monde arabe.

Il nous semble important de rappeler ici que la majorité de ces quatre millions de civils dans le nord-ouest syrien, qui viennent de toutes les régions de Syrie, ont déjà subi plusieurs déplacements forcés pour fuir les sièges, les famines provoquées, les bombardements, les arrestations, la torture et les disparitions forcées avant de se retrouver pris au piège dans ces camps. Iels ont été forcé.es de quitter leurs maisons, leurs villes et villages parce qu’un jour iels ont trouvé le courage d’oser le rêve d’une future Syrie démocratique qui protège ses citoyens et garantit leurs droits, quelles que soient leurs appartenances ethniques ou religieuses. Ce rêve d’un Etat de droit en Syrie leur a valu une répression sanglante de la part d’un régime tyrannique secondé par les milices shiites libanaise, irakienne et surtout iranienne, soutenues par l’aviation russe qui a détruit l’essentiel des infrastructures, tout en expérimentant une panoplie d’armes interdites. 

Il nous est très difficile de croire que le dictateur qui a affamé la population civile dans les régions assiégées par ses forces armées et ses alliés souhaite aujourd’hui aider cette même population qui avait dû fuir ces régions et qui se trouve actuellement dans le nord-ouest syrien! N’oublions pas que cette région dévastée par le séisme de février dernier a été continuellement bombardée par le régime Assad et ses alliés, même pendant les opérations de secours, entravant volontairement la recherche de survivants. Et suite à ce séïsme qui a touché aussi les territoires sous contrôle du régime Assad, ce dernier a dérobé une grande partie de l’aide destinée aux victimes!

Le camp Rukban est par ailleurs un exemple d’actualité de la cruauté du régime Assad qui l’assiège depuis 2016 et qui empêche les organisations onusiennes d’y distribuer l’aide humanitaire.

Aujourd’hui nous espérons que les organisations onusiennes ne tomberont pas dans le piège de ces manipulations russo-syriennes et nous vous adressons notre demande pour que la Suisse agisse rapidement pour empêcher que ce seul passage encore hors du contrôle d’Assad ne tombe sous l’autorité du régime comme ceux du nord et du sud de la Syrie. Nous réitérons également notre demande de sortir le dossier humanitaire du Conseil de Sécurité en le confiant à l’Assemblée Générale de l’ONU ou au Haut Commissariat des Droits de l’Homme, loin du chantage politique.

Dans le cas contraire, il nous paraît indispensable d’oeuvrer sans tarder pour une réelle réforme du Conseil de Sécurité afin d’abolir le droit de veto anti-démocratique qui donne actuellement le moyen aux Etats les plus puissants d’écraser les populations vulnérables comme la population du nord-ouest syrien.

Cette catastrophe syrienne, aggravée par le tremblement de terre de février 2023, perdure depuis plus de 12 ans dans le silence assourdissant de la communauté internationale qui prend sa complexité pour excuse! 

Il est utile de rappeler ici que de multiples procès relatifs aux crimes de guerre et aux crimes contre l’humanité commis en Syrie, par le régime Assad, ont vu le jour dans plusieurs pays occidentaux. Très récemment, les Pays-Bas et le Canada ont saisi la Cour Internationale de Justice qui commence ses audiences dans les jours à venir, pour des crimes de torture et de disparition forcée commis par le régime Assad.

En un mot, ce régime qui a provoqué le déracinement de plus de la moitié de la population syrienne est un régime illégitime!

Aujourd’hui, nous demandons à la Suisse une action concrète et rapide pour rendre à l’aide humanitaire son humanité et pour empêcher que le droit international ne soit davantage bafoué en Syrie. Une action qui empêche la mainmise totale de ce régime criminel sur le dernier point de passage fonctionnel pour l’aide humanitaire, Bab al-Hawa, et qui mette fin aux blocages politiques de l’aide humanitaire par l’un des membres les plus puissants du Conseil de Sécurité!

En vous remerciant d’avance pour l’attention que vous porterez à cette lettre, nous vous prions d’agréer, Monsieur le Conseiller fédéral, nos salutations distinguées.

FSD, 15.07.2023

Appel à l’aide des réfugié.es syriens à Arsal au Liban

Le 18 avril 2023, le Centre d’Accès pour les Droits de l’Homme (ACHR) au Liban a tiré la sonnette d’alarme pour attirer l’attention sur les déportations massives forcées récentes de 64 réfugié.es du Liban vers la Syrie. Il est à préciser que ces réfugié.es ont été transféré.es et livré.es directement aux forces du régime syrien. Dans la foulée,  plusieurs articles de presse dénoncent cette action. Récemment, Amnesty International a également appelé le Liban à stopper ces exactions qui mettent ces réfugié.es en danger d’arrestation et de torture.

Le 24 avril 2023, Campagne Populaire des Réfugié.es Syrien.nes à Arsal a diffusé un appel à l’aide, via les réseaux sociaux et la presse arabe, adressé à la communauté internationale, aux organisations de la société civile et à celles des droits humains. Dans cet appel, reproduit ci-dessous et traduit par FSD, on découvre aussi une sélection d’autres répressions dont sont victimes les Syrien.nes à Arsal, comme la fermeture de huit centres éducatifs pour enfants il y a un an et la fermeture récente de quatre centres de soins médicaux.

FSD

Lettre de nos compatriotes réfugiés syriens à Arsal adressée à la communauté internationale et aux organisations humanitaires:

Nos salutations chaleureuses à

  • Monsieur le secrétaire général des Nations Unis
  • Les gouvernements des états engagés dans l’aide aux réfugiés syriens au Liban
  • Le gouvernement des Etats Unis d’Amérique
  • Le gouvernement du Royaume-Uni
  • Le gouvernement de la France
  • Les organisations de la société civile et celles des Droits de l’Homme.

Les réfugiés syriens au Liban en général et ceux des camps de réfugiés de Arsal en particulier souffrent de très grandes pressions exercées par les autorités libanaises. Cette souffrance a empiré encore aujourd’hui depuis la démission de la mairie de la ville de Arsal, et la reprise du dossier des réfugiés syriens par le maire de Baalbek-Al-Harmel, Bachir Khader.

A Arsal il y a 100’000 réfugiés syriens dispersés dans des camps en bordure de la ville et des lotissements. Des camps de misère et de mort. Nous avons fui les barils de la mort lancés sur nous par le régime syrien, sur le Qalamun Ouest et la région de Homs, pour finalement nous retrouver au Liban où nous nous sommes construit des tentes avec des bâches en plastique et du bois et ceci malgré les prix excessifs et racistes pratiqués pour des emplacements de tentes sans accès à l’électricité ni aux rudiments de survie.

Dans la ville de Arsal qui nous accueille vivent environs 50’000 citoyen libanais. Cela fait avec les réfugiés environs 150 mille habitants. 8 centres éducatifs opéraient auprès des réfugiés. Ils ont été fermés il y a un an par le ministère de l’éducation du Liban sous des prétextes fallacieux. Aujourd’hui le maire de Baalbek-Al-Harmel a ordonné brutalement la fermeture de 4 centres médicaux. Il faut savoir que ces centres humanitaires fonctionnaient quasiment sans frais, les médecins et leurs équipes étant syriens et bénévoles.

Oui nous vivons une situation dramatique insupportable. Car en plus des conditions de vie difficiles qui menacent la vie de nombre d’entre nous avec l’arrêt de l’aide alimentaire pour beaucoup, de la part des Nations Unies, sous prétexte d’insuffisance financière, où est censé se rendre désormais un malade après la fermeture de ces 4 centres médicaux: Centre Medical de Arsal, Dispensaire Al Salam, Centre Medical Amal, Centre Medical New Arsal?

Nous demandons 

1- d’accorder protection et soin aux réfugiés syriens de Arsal suite aux menaces de déportation et de les livrer aux services du régime syrien.

2- ou de chercher un état de substitution pour une réinstallation dans un autre pays.

Avec nos remerciements

Campagne populaire des réfugiés syriens de Aras

Réfugiés Syriens: Récentes Déportations Forcées Massives du Liban

Suite aux renvois forcés massifs récents des réfugiés syriens du Liban FSD a choisi de traduire la déclaration urgente du Centre d’Accès pour les Droits de l’Homme (ACHR) à Beyrouth qui documente ces exactions.

Les enfants syriens dans les camps des réfugiés (Photo de JYZ)

Déclaration Urgente

sur les déportations massives forcées des réfugiés syriens du Liban

Centre dʼAccès pour les Droits de lʼHomme, 18.04.2023

Beyrouth, Liban

Les autorités libanaises ont expulsé 64 réfugiés syriens pendant ce mois d’avril, à la suite de rafles arbitraires menées dans différentes régions du Liban. Ces opérations ont été menées sans tenir compte du statut juridique et politique de ces réfugiés en Syrie, violant ainsi le droit international, notamment l’article 13 de la Déclaration universelle des droits de l’homme, l’article 14 de la Charte arabe des droits de l’homme et l’article 3 de la Convention contre la torture.

Les 10 et 11 avril 2023, l’armée libanaise a procédé à la déportation massive de 29 réfugiés syriens après avoir effectué une descente dans leurs lieux de résidence à Haret Al-Sakher – Jounieh. Ils ont été transférés vers une zone située au-delà de la frontière libano-syrienne, via le poste frontière de Masnaa. Selon l’équipe de l’ACHR, ces raids étaient arbitraires. 

L’armée libanaise a également procédé à une autre déportation massive de 35 réfugiés syriens à Wadi Khaled, dans le nord du Liban. En effet, l’armée libanaise et les services de renseignements de l’armée ont effectué une descente sur leur lieu de résidence à Al Mazra’a, dans le district de Kfardebian dans la région de Kesrouane. Ils ont ensuite été transférés à la caserne militaire de Sarba à Jounieh, puis au poste de contrôle de Shadra à Akkar avant d’être remis à la 4e division de l’armée syrienne (note du traducteur: cette division est sous la direction de Maher Assad).

Lors des raids, les réfugiés ont été soumis à des mauvais traitements dans des conditions inhumaines, alors qu’il y avait parmi eux des malades et des enfants. Certains étaient enregistrés auprès du HCR, et même si les réfugiés déportés n’avaient pas de résidence légale au Liban, ils étaient entrés légalement et régulièrement au Liban. Leur sort en Syrie reste inconnu à ce jour.

Nous craignons que ces actions récentes ne résultent du plan annoncé par le gouvernement libanais fin 2022, dans lequel il a déclaré son intention de renvoyer 15 000 réfugiés par mois en Syrie, sans révéler le contenu du plan, ni les moyens déployés par le gouvernement pour sa mise en œuvre. Ce plan a été largement condamné par les organisations de défense des droits de l’homme, dont l’ACHR, ainsi que par le HCR des Nations Unies, le 29 juillet 2022, dans une déclaration retirée par la suite, dans laquelle il appelait le gouvernement libanais à respecter les conditions d’un retour volontaire, dans la dignité et en toute sécurité.

Toutes ces opérations sont menées dans un black-out médiatique total dont nous craignons qu’il soit délibéré et lié au plan mentionné, car ces deux cas de déportation massive que l’ACHR a suivis n’ont été rapportés par aucun média, contrairement à ce qui est courant dans les agences de presse locales, à savoir de transmettre et couvrir la plupart des incidents qui se produisent au Liban.

Dans le cadre de sa publication périodique, l’ACHR poursuit la documentation des cas de réfugiés systématiquement déportés. Cependant l’ACHR continue d’informer les bureaux du HCR au Liban des cas de personnes déportées, en soulignant les dangers potentiels pour les réfugiés déportés en Syrie, sachant que l’un des rôles principaux du HCR est de traiter les déportations forcées et de s’occuper de tout ce qui pourrait constituer une menace pour les réfugiés syriens.

Malheureusement, le dossier des réfugiés syriens au Liban est plein de violations, et ce qui s’est passé à la date mentionnée ci-dessus représente une escalade dangereuse de la part du gouvernement libanais et de ses institutions de sécurité pour traiter les réfugiés syriens sur son sol avec des méthodes qui sont en contradiction flagrante avec la Charte internationale des droits de l’homme.

Tout individu a le droit de demander l’asile et la protection contre la violence et la persécution, comme le stipule la Déclaration universelle des droits de l’homme et le droit international, y compris le droit, en tant que réfugiés, d’accéder à la protection et à l’assistance ; leurs droits ne devraient être violés en aucune circonstance et sous aucune forme. L’article 9 de la Déclaration universelle des droits de l’homme stipule que nul ne peut être soumis à l’expulsion ou à la détention illégale, tandis que l’article 14 de la Charte arabe des droits de l’homme interdit la torture, les mauvais traitements et les traitements inhumains, y compris l’expulsion forcée. En vertu de l’article 3 de la Convention contre la torture, les États ne sont pas autorisés à soumettre quiconque à des traitements cruels, inhumains ou dégradants. Les États sont tenus d’appliquer les mesures nécessaires pour protéger les individus contre ces formes de traitement. L’article 13 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques interdit l’expulsion forcée de toute personne vers tout pays où elle pourrait être poursuivie et n’autorise que l’expulsion des étrangers qui résident illégalement dans le pays, mais cela suppose que l’État remplisse toutes les obligations qui lui incombent en vertu des lois et accords internationaux pertinents. L’État ne peut prendre aucune mesure lui permettant de se soustraire à ces obligations. Les pays qui souhaitent expulser des étrangers doivent vérifier qu’ils ne sont pas persécutés dans leur pays d’origine et qu’ils ne seront pas soumis à la torture ou à des mauvais traitements.

Selon le ACHR, les réfugiés vivant sur le territoire libanais ne devraient donc pas être expulsés ni transférés arbitrairement vers la Syrie, car ils pourraient être exposés à des risques de torture ou de mauvais traitements, en plus de l’absence de conditions garantissant leur sécurité et une vie décente dans leur pays. De telles expulsions iraient à l’encontre de tous les accords et traités internationaux qui garantissent les droits des réfugiés. Par conséquent, il est essentiel de mettre fin à ces déportations massives et forcées et de permettre aux personnes contre lesquelles des décisions d’expulsion ont été prises de les contester par les moyens légaux appropriés.

Nous appelons également le Conseil suprême de défense du ministère de la Défense à revenir sur la décision publiée en avril 2019, qui a eu un impact significatif sur la légitimation des violations commises par les services de sécurité à l’encontre des réfugiés syriens au Liban. Par conséquent, nous appelons à nouveau les autorités libanaises à respecter pleinement les lois et accords internationaux signés. 

Nous demandons également de ne pas prendre de décision qui ne respecte pas les conditions de retour volontaire approuvées par le HCR dans sa déclaration supprimée, dans laquelle il a exprimé sa profonde préoccupation concernant les pratiques restrictives et les mesures discriminatoires à l’encontre des réfugiés au Liban. A cet égard, nous invitons le HCR à faire des efforts plus significatifs pour lutter contre les violations des droits des réfugiés syriens au Liban, y compris les arrestations arbitraires, les disparitions forcées, la torture et les déportations forcées. 

Enfin, nous appelons la communauté internationale à ne pas ignorer les violations susmentionnées qui exposent les réfugiés à des risques directs. Nous les appelons aussi à activer, dans ses mécanismes de financement, le principe de l’approche conditionnelle basée sur le respect des droits humains, en particulier en ce qui concerne les réfugiés soumis à des pressions de la part des autorités libanaises.

Traduit partiellement de la version anglaise avec http://www.DeepL.com/Translator (version gratuite)

Le Croissant Rouge Arabe Syrien est-il un partenaire crédible pour l’aide humanitaire en Syrie?

Une lettre ouverte a été adressée, le 6 mars 2023, par Free Bar Association et Femmes Syriennes pour la Démocratie, à Mme Mirjana Spoliaric Egger, présidente du CICR et à M. Ignazio Cassis, conseiller fédérale et chef du Département des Affaires Etrangères de la Confédération helvétique, ceci à l’occasion de l’annonce de la tenue de la conférence des donateurs en faveur des victimes du séisme en Turquie et en Syrie, organisée par le conseil de l’Union Européenne le 16 mars 2023. Dans cette lettre du 5 mars 2023, la seule demande adressée à la Suisse et au CICR est d’oeuvrer pour l’exclusion du Croissant Rouge Arabe Syrien (CRAS) à cette conférence. En effet, le CRAS est lié directement au régime Assad et ses actions sont dirigées par les services de renseignement du régime syrien qui a commis des crimes de guerre et des crimes contre lhumanité.

FSD

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Monsieur le Conseiller fédéral, chef du DFAE,

Madame la Présidente du CICR,

Nous souhaitons, par la présente, attirer votre attention sur une lettre de l’union des avocats libres de Syrie qui a été adressée au Président du conseil européen le 3 mars 2023. Vous trouverez, ci-joint, la lettre originale en arabe ainsi que sa traduction en français. Par ailleurs, un groupe de juristes syriens et syriennes en France a également initié une action intitulée « Le Croissant Rouge Syrien, le bras d’Assad pour les violations » à l’attention du parlement français et du parlement européen, accompagnée d’une pétition. 

Ces actions mettent en garde contre toute invitation du Croissant Rouge Arabe Syrien (CRAS), impliqué directement ou indirectement dans les violations des droits humains en Syrie, à participer à cette conférence comme un acteur principal dans l’aide humanitaire aux victimes du séisme en Syrie. Une telle invitation constitue une reconnaissance d’un régime criminel (1) qui a mené une guerre de douze ans contre sa population et qui a commis des crimes atroces contre l’humanité ainsi que des crimes de guerre. Elle met aussi en danger une distribution juste et efficace de l’aide adressée aux victimes syriennes du séisme. En effet, le CRAS est une organisation qui agit sous le contrôle du régime syrien et toute distribution de l’aide humanitaire via le CRAS sera en grande partie détournée (voir le rapport récent du Réseau Syrien des Droits  de l’Homme (2), le témoignage récent d’une employée allemande du Croissant Rouge Kurde(3), The Guardian 2016(4) ).

Aujourd’hui, nous demandons à la Suisse et au CICR d’intervenir pour l’exclusion du CRAS de la conférence des donateurs du 16 mars 2023. 

Nous sommes parfaitement conscients que le CICR travaille étroitement avec le CRAS à l’intérieur de la Syrie comme l’exige ses principes d’action dans l’aide humanitaire. Néanmoins, il peut éviter d’enjoliver l’image d’un régime criminel en ne cautionnant pas la participation cette organisation qu’il a lui-même reconnu précédemment comme organisation sous le contrôle du régime (5).

En vous remerciant d’avance pour l’attention que vous porterez à cette lettre, nous vous prions d’agréer, Monsieur le Conseiller fédéral, Madame la Présidente du CICR, nos salutations distinguées.

Signée par le représentant en Suisse de l’Union des Avocats Libres et par une membre de Femmes Syriennes pour la Démocratie.

(1) En arabe: https://www.syria.tv/عن-الهلال-الأحمر-السوري-مشاركاً-بمؤتمر-المانحين-في-بروكسل

 Le président du CRAS profite du séisme pour appeler à la levée des sanctions économiques sur le régime Syrien:  https://twitter.com/SYRedCrescent/status/1623058576075005953?s=20

Voir aussi l’article: Le Croissant Rouge et le Régime Assad

(2) https://snhr.org/blog/2023/02/28/a-total-of-7259-syrians-including-2153-children-and-1524-women-died-due-to-the-turkey-syria-earthquake-2534-died-in-non-regime-territories-394-in-regime-territories-and-4331-in-turkey/

(3) https://twitter.com/FadiAmro11/status/1624698309670498305?ref_src=twsrc%5Etfw%7Ctwcamp%5Etweetembed%7Ctwterm%5E1624698309670498305%7Ctwgr%5E47bce7e2fac0527e7630c83f792ac378915e4eb4%7Ctwcon%5Es1_&ref_url=https%3A%2F%2Forient-news.net%2Far%2Fnews_show%2F201924

(4)https://www.theguardian.com/world/2016/aug/29/un-pays-tens-of-millions-to-assad-regime-syria-aid-programme-contracts

(5)


Lettre originale en arabe de l’Union des Avocats Libres en Syrie adressée avec sa traduction en français au conseil de l’union européenne le 3 mars 2023

Traduction en français de la lettre originale en arabe

Lettre de l’Union des Avocats Libres en Syrie

Adressée au Président du conseil européen M. Tobias Billström 

Monsieur le Président du conseil de l’Union Européenne,

Nous vous adressons nos salutations de droit et de justice.

Notre union des avocats libres en Syrie vous exprime son appréciation et sa reconnaissance pour votre intérêt pour la cause du peuple syrien et pour vos efforts pour alléger les souffrances humaines des syrien.nes suite à la catastrophe dûe au séisme qui a récemment frappé le nord de la Syrie.

Nous souhaitons tout d’abord préciser que l’aide humanitaire qui a atteint les zones touchées dans le nord-ouest est encore très limitée et ne répond pas aux besoins.

Nous voudrions également attirer votre attention sur le danger que présente l’éventuelle participation du Croissant-Rouge Arabe Syrien (CRAS) en tant que représentant des Syriens à la Conférence des donateurs qui se tiendra à Bruxelles le 16 mars. Nous précisons en particulier qu’il est très dangereux d’impliquer le CRAS dans l’acheminement de toute aide destinée aux Syriens affligés par cette catastrophe. Cette organisation est affiliée au régime Assad et opère sous les directives des services de renseignement syriens. Elle est même accusée d’avoir contribué à verser le sang des Syriens, selon les rapports d’Amnesty International et Human Rights Watch.

Par conséquent, nous vous demandons d’empêcher sa participation à cette conférence et d’éviter de lui remettre toute aide humanitaire, car cette aide sera détournée pour financer les tueries et la répression que le régime terroriste continue de mener contre la population syrienne.

Nous appelons également à envoyer davantage d’aide dans les zones touchées du nord-ouest de la Syrie.

Avec notre sincère respect et appréciation.

Union des Avocats Libres en Syrie

Syrie, 02.03.2023

Retour en enfer, seul choix laissé aux Migrant.es

Lettre ouverte adressée à M. Antonio Vitorino, directeur général de l’OIM

Monsieur le Directeur général de l’OIM,

Notre collectif Femmes Syriennes pour la Démocratie (FSD) suit avec beaucoup d’inquiétude les événements qui se passent sur la frontière entre la Biélorussie et la Pologne. Comme vous le savez, parmi les migrant.es qui sont pris en otage et qui risquent leur vie sur cette frontière il y a beaucoup de ressortissant.es syrien.nes. 

Les dernières nouvelles indiquent que les autorités biélorusses poussent les migrant.es vers la frontière avec l’Union Européenne, qui refuse de les laisser entrer. La nourriture et l’eau manquent fortement, seule une petite quantité d’aide leur parvient du côté biélorusse alors que les forces polonaises refusent d’aider même les plus vulnérables. 

Très récemment nous avons appris par Nawal SOUFI qu’actuellement les migrant.es reçoivent un papier leur donnant le choix entre déposer une demande d’asile en Biélorussie ou bien demander leur rapatriement « volontaire » via l’OIM (voir une photo de ce papier ci-après). Vous trouverez aussi, ci-joint, une traduction en français d’une interview de Nawal SOUFI, publiée sur un site d’information, en italien.

Photo du papier distribué aux Migrant.es à la frontière

Vous n’êtes pas sans savoir que si la Biélorussie donne des visas à des ressortissant.es en quête de sécurité c’est seulement pour son propre intérêt, elle ne leur octroierait donc certainement pas l’asile. Ce qui veut dire qu’une demande d’asile aboutirait, très certainement, à leur renvoi vers leur pays d’origine. Ce qui a pour conséquence que le seul choix proposé à ces gens c’est le retour à l’enfer qu’ils tentent de fuir. Et la grande majorité de ces personnes n’a plus ni la possibilité de vivre en sécurité dans son pays d’origine ni la possibilité de le quitter. En tout les cas toutes les frontières sont fermées aujourd’hui pour les Syrien.nes.

L’implication de l’OIM dans ce « choix » de rapatriement nous surprend, alors même que les organisations de défense des droits humains lancent l’alerte contre tout renvoi vers la Syrie. Il est clair qu’aujourd’hui aucune région de la Syrie n’est sûre, selon la décision de la Cour Européenne pour les Droits de l’Homme du 14 septembre 2021.

Nous vous demandons donc d’agir rapidement pour sauver ces migrant.es (enfants, femmes et hommes) en leur donnant accès à de l’aide humanitaire tout d’abord et en les aidant ensuite à trouver un lieu et un vrai pays d’accueil.

En vous remerciant pour l’intérêt que vous porterez à cette lettre, nous vous adressons, Monsieur le Directeur général de l’OIM, nos salutations distinguées.

Femmes Syriennes pour la Démocratie

Le renvoi des réfugié.es syrien.nes est un crime contre l’Humanité

Dix ans après le début de la révolution syrienne, les Syrien.nes de l’intérieur poursuivent leur résistance contre le régime Assad. Depuis le début de cette année 2021, alors que la presse s’en est largement désintéressée, la Syrie revit les étapes de la révolution, à vitesse accélérée. Tout d’abord l’apparition des messages contre la réélection d’Assad qui ont envahi les murs à Sweida (au sud), ensuite les manifestations populaires, aussi bien à Idleb au nord-ouest que dans la région de Daraa au sud (sous contrôle du régime), qui scandent à nouveau les slogans de la révolution. Sans oublier la grève générale dans la région de Daraa, le jour des « élections » présidentielles, et les autres formes de résistance ailleurs en Syrie, de Damas-campagne à Alep, en passant par Homs. Les réactions répressives du régime ont été immédiates: arrestations partout en Syrie, siège de Daraa et  famine imposée, suivis par les bombardements et le déplacement forcé de la population.

Les événements à Daraa ont été médiatisés et ont suscité des prises de position verbales par plusieurs pays occidentaux (la France, l’Europe et le Canada) pour dénoncer cette répression armée tout comme le refus du régime de laisser passer l’aide humanitaire dans la région assiégée.

Malgré cette résistance qui n’a jamais cessé et malgré la faillite économique de la Syrie d’Assad, le président du CICR Peter Maurer invite la communauté internationale, lors de la conférence de Bruxelles le 30 mars 2021, à augmenter l’aide humanitaire à l’intérieur de la Syrie(via le régime). Curieusement pour P. Maurer la question de la responsabilité d’Assad dans cette catastrophe doit s’effacer devant l’urgence humanitaire. On oublie là que les camps des déplacés internes dans le nord-ouest de la Syrie tout comme dans le sud sont privés d’aide humanitaire suffisante, alors que l’aide véhiculée par le régime n’atteint que très partiellement ceux qui en ont besoin

Récemment, le haut commissaire de l’ONU pour les réfugié.es, Filippo Grandi, a fait une visite de deux jours à Damas. Il a demandé au gouvernement d’Assad d’assurer la sécurité des réfugié.es à leur retour en Syrie! Comment peut-on demander à un criminel toujours actif et à ses services de renseignements de sinistre notoriété d’assurer la sécurité de leurs victimes, qui avaient fui le pays à cause de ce même criminel et de son appareil « sécuritaire » (voir le rapport d’Amnesty International et de celui de HRW au sujet des dangers du retour des réfugiés)? D’ailleurs, une chercheuse de HRW lance une alerte contre le rapprochement visible des organisations de l’ONU avec la Syrie d’Assad.

Alors que les Syrien.nes tentent aujourd’hui encore de fuir leur pays pour trouver refuge en Europe ou ailleurs, ceci malgré les dangers de ce périple (voir le passage de la Biélorussie en Pologne), le Danemark continue de retirer les permis de séjours de certains réfugié.es syrien.nes et de les confiner dans un centre de rétention en attendant (et peut-être pour forcer) leur accord pour un renvoi vers la Syrie. Ces centres de rétention constituent une privation de la liberté de ces gens qui ont le choix entre la mort ou rester pour une période indéterminée en rétention! 

La Cour Européenne pour les Droits de l’Homme a jugé un cas de renvoi de la Russie vers la Syrie, en se basant sur plusieurs rapports récents relatifs à la situation en Syrie. Elle a ainsi rendu sa décision le 14 septembre concluant que tout renvoi en Syrie pourrait mettre la vie des personnes renvoyées en danger ou bien les exposer à des mauvais traitements etc., ceci quel que soit leur statut dans le pays d’asile et quelle que soit la région dont ils sont originaires. Il semble que le Danemark ne voie pas là de raison pour changer ses pratiques.

Mazen Darwish et Mariana Karkoutly, avocat et juriste activistes syrien.es étaient récemment invité.es au Palais fédéral pour témoigner de la situation politique et humanitaire en Syrie, iels ont mis en garde explicitement contre tout renvoi des réfugié.es vers la Syrie1

Aujourd’hui, les Syrien.nes en Europe craignent leur renvoi en Syrie. Plusieurs procès sont en cours en Europe contre les responsables de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité. Procès utiles et nécessaires certes, mais qui ne répondent pas à la question que se posent des centaines de milliers de syrien.nes: où est mon père? où est ma soeur? que sont-ils tous devenus?

Mazen Darwish, Mariana Karkoutly et Ibraheem Malki, activistes pour les droits humains, affirment qu’en Syrie seuls la justice et le principe de la responsabilité permettront à une solution politique d’émerger et d’acheminer le pays vers une paix durable. Iels demandent à la Suisse d’utiliser la compétence universelle dans le cas du dossier syrien1.

Quant à Tawfik Chamaa, médecin d’origine syrienne à Genève, membre fondateur de l’UOSSM, il rappelle que la crise économique en Syrie est aggravée par le COVID, en particulier dans la région nord-ouest qui abrite la majorité des déplacé.es forcé.es. Il appelle la Suisse à l’aide pour obtenir sans délai des doses de vaccin en quantité suffisante dans cette région1.

Ne fermons pas les yeux sur l’évidence que le renvoi des réfugié.es syrien.nes en Syrie serait aujourd’hui un crime contre l’Humanité et que seule une transition politique sans le régime Assad peut changer cette situation.

Assad n’est pas un rempart contre le terrorisme, il en est l’instigateur (voir l’intervention de I. Malki).


1 Voir les interventions de M. Karkoutly, de M. Darwish, de I. Malki et de T. Chamaa

Situation Humanitaire et Politique en Syrie: Témoignages au Palais Fédéral (4/4 I. Malki)

Quatre intervenant.es syrien·nes, engagé.es dans la défense des droits humains du peuple syrien, étaient présent·es au Palais fédéral jeudi 30 septembre 2021, à l’invitation du parlementaire Christian Dandrès, pour témoigner de la situation humanitaire et politique en Syrie, et parler des procès menés en Europe contre des responsables de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité en Syrie. Les conséquences terribles du COVID ont aussi été au centre de la discussion. Dix ans après le début du soulèvement populaire, les activistes de la société civile et la population civile résistent toujours face à un régime dictatorial et criminel. 

Les intervenant·es sont selon l’ordre d’intervention: 

Mariana KARKOUTLY, juriste syrienne exilée en Allemagne, enquêtrice pour la poursuite des crimes commis en Syrie depuis 2011

Mazen DARWISH, avocat syrien exilé en France, fondateur et président du Centre syrien pour les médias et la liberté d’expression

Tawfik CHAMAA, médecin suisse d’origine syrienne, membre fondateur de l’Union des Organisations de Secours et Soins Médicaux (UOSSM) 

Ibraheem MALKI, avocat et activiste syrien exilé en Suisse, membre de la Commission de défense des détenus d’opinion arrêtés à la suite de l’arrestation des membres de la déclaration de Damas en 2006 et membre du Centre syrien pour la justice et pour l’obligation de rendre des comptes.

Les interventions ont été traduites en français par FSD et sont publiées ci-après. 

Intervention de Ibraheem Malki 4/4

Je suis l’avocat Ibraheem Malki, membre du comité pour la défense des détenu.es en Syrie, ancien détenu et aujourd’hui je suis réfugié en Suisse.

Je remercie mes collègues qui ont abordé la question des violations en Syrie. A la lumière de ces violations, des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre commis par Bachar al-Assad envers les Syrien.nes, on se demande comment le monde tout entier et en particulier les pays actifs dans les droits humains, y compris la Suisse, n’en sont pas venus à l’évidence que ce dictateur est un criminel? Les crimes continuent en Syrie, le monde reste silencieux, et il y a là une lacune dans le principe de la responsabilité. 

La Syrie a vécu ces dernières années et vit toujours un conflit armé brutal, des attaques aveugles par  bombardements aériens, tuant des civils, détruisant des villes et utilisant des armes chimiques toxiques sur le peuple syrien. L’injustice, l’oppression et la brutalité ont été et sont encore le langage du régime, de ses services de renseignement et de ses forces armées pour faire face aux syrien.nes pacifiques. Et dans cette brutalité, Bachar al-Assad a eu et tient encore le rôle principal qui a conduit à la tragédie du peuple syrien qui se poursuit.

Et à propos de ces crimes, qui touchent aussi Europe et de la propagation du terrorisme en Europe, ils portent aussi la signature d’Assad, criminel de guerre par excellence. 

Nous, en tant que Syrien.nes, voulons la justice. Nous ne nous vengeons pas, nous voulons respecter le principe de la justice, même s’il est quelque peu incomplet. Il n’est pas possible de résoudre le problème de la Syrie sans le principe de la responsabilité. Ensuite viendra la réconciliation, et la suite. Même la question de la stabilité et de la solution politique ne peut se régler sans régler d’abord la question de la responsabilité.

Aujourd’hui, je m’adresse ici au Conseil Fédéral, qui incarne une histoire d’humanité et de valeurs humaines, héberge les conventions de Genève et leurs protocoles qui ont été établis en Suisse, et de nombreuses organisations internationales de défense des droits humains: « Vous ne devriez pas fermer les yeux sur l’impunité ni accepter l’idée que Bachar al-Assad soit maintenu comme président reconnu et agréé par les Etats Unis ou l’Europe ». 

Bern, le 30.09.2021

En Syrie maintenant, nous n’avons pas d’autre choix que de revendiquer la justice. Vous savez que certaines instances pour rendre justice ne sont pas accessibles à cause du veto russe qui empêche l’accès à la Cour pénale internationale d’une part et à cause de la présence du régime à l’intérieur de la Syrie d’autre part. Par conséquent, nous demandons l’application du principe de la compétence universelle qui pourrait être appliqué pour les violations graves commises en Syrie. Deux pays, l’Allemagne et la Norvège, ont instruit des procès basés sur ce principe. Le tribunal de Coblence en est l’exemple, où deux anciens responsables qui travaillaient pour les renseignements généraux en Syrie, dans la branche de Damas, sont jugés:

– Eyad A. qui a été condamné à quatre ans de prison pour avoir commis une trentaine de crimes contre l’humanité. 

– Le général Anwar R. qui est actuellement jugé pour des crimes contre l’humanité, et pour qui le verdict sera rendu dans deux mois. L’avocat Brooker s’attend à ce que le verdict soit de plus de vingt ans et puisse atteindre la réclusion à perpétuité. 

La juge Catherine Marchi-Uhel, responsable du mécanisme international impartial et indépendant de l’ONU situé à Genève, a estimé que le tribunal de Coblence est le premier tribunal au monde à rendre un verdict de condamnation pour des violations commises en Syrie. Bien sûr, ce résultat doit beaucoup à de nombreuses personnalités, des procureurs, des enquêteurs et des professionnels du droit. Il y a 12 procès en cours en Europe (en Allemagne, Norvège, France, Suède, Pays-Bas et Autriche). Alors qu’en Suisse, il y a qu’une procédure contre Rifaat al-Assad (oncle de Bachar al-Assad) mais qui n’avance pas. Trial International a accusé le procureur général suisse d’avoir ralenti la mise en oeuvre de la procédure contre Rifaat al-Assad. Une dénonciation pénale de Trial contre Rifaat al-Assad a eu lieu en 2013 et ensuite la procédure a été gelée. Elle a été réactivée en 2017, puis elle a été gelée encore une fois. Il semble qu’il n’y ait pas de volonté politique pour aller de l’avant avec ce dossier, alors que la Suisse est un pays neutre et le lieu de la solution de nombreux problèmes et réconciliations par excellence.

Selon José de la Mata,  le juge espagnol qui examine le procès intenté par l’Espagne contre Rifaat al-Assad, celui-ci posséderait une fortune en Suisse depuis 1984. L’argent volé à la Syrie serait en partie en Suisse.

Nous attendons avec espoir que la Suisse joue un rôle important en ouvrant les portes à la poursuite des auteurs de crimes de guerre (notamment Rifaat al-Assad*, auteur de massacres à Palmyre et à Hama). La Suisse a l’expérience, l’intégrité, la justice, l’impartialité, une force économique, une expertise technique et diplomatique, et peut supporter des charges financières, mais elle a besoin de volonté politique.

Je vous remercie pour votre écoute. Je vous remercie d’avance d’écouter les victimes des violations à l’encontre des détenu.es d’opinion et les prisonniers de Syrie et pour écouter les demandes du peuple syrien pour mettre fin à sa souffrance. Car vous portez en vous la même humanité que nous tou.tes dans ce monde.


* Rifaat al-Assad retourne en Syrie le 7 octobre 2021 pour y trouver refuge et éviter la condamnation qui a été confirmée en France. Plus d’information sur le site de Trial International

Situation Humanitaire et Politique en Syrie: Témoignages au Palais Fédéral (1/4 M. Karkoutly)

Situation Humanitaire et Politique en Syrie: Témoignages au Palais Fédéral (2/4 M. Darwish)

Situation Humanitaire et Politique en Syrie: Témoignages au Palais Fédéral (3/4 T. Chamaa)

Situation Humanitaire et Politique en Syrie: Témoignages au Palais Fédéral (3/4 T. Chamaa)

Quatre intervenant.es syrien·nes, engagé.es dans la défense des droits humains du peuple syrien, étaient présent·es au Palais fédéral jeudi 30 septembre 2021, à l’invitation du parlementaire Christian Dandrès, pour témoigner de la situation humanitaire et politique en Syrie, et parler des procès menés en Europe contre des responsables de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité en Syrie. Les conséquences terribles du COVID ont aussi été au centre de la discussion. Dix ans après le début du soulèvement populaire, les activistes de la société civile et la population civile résistent toujours face à un régime dictatorial et criminel. 

Les intervenant·es sont selon l’ordre d’intervention: 

Mariana KARKOUTLY, juriste syrienne exilée en Allemagne, enquêtrice pour la poursuite des crimes commis en Syrie depuis 2011

Mazen DARWISH, avocat syrien exilé en France, fondateur et président du Centre syrien pour les médias et la liberté d’expression

Tawfik CHAMAA, médecin suisse d’origine syrienne, membre fondateur de l’Union des Organisations de Secours et Soins Médicaux (UOSSM) 

Ibraheem MALKI, avocat et activiste syrien exilé en Suisse, membre de la Commission de défense des détenus d’opinion arrêtés à la suite de l’arrestation des membres de la déclaration de Damas en 2006 et membre du Centre syrien pour la justice et pour l’obligation de rendre des comptes.

Les interventions ont été traduites en français par FSD et sont publiées ci-après. 

Intervention de Tawfik Chamaa 3/4

La situation humanitaire en Syrie est la catastrophe humanitaire la plus importante depuis la 2e guerre mondiale.

Dès le début des manifestations en 2011, l’action humanitaire en soi a été prise en otage. Les civils qui manifestaient pacifiquement dans la rue étaient pris pour cible et tirés à balles réelles, Les médecins et les soignant.es qui voulaient soigner les premiers blessés, étaient capturés, médecins et infirmier.es. C’est ainsi que notre organisation l’UOSSM a vu le jour. 

Les quartiers d’où sortaient les manifestations étaient bombardés, quelques hôpitaux aussi. Même les soignant.es du croissant rouge, qui étaient en faveur de l’égalité des soins pour tous, ont été exfiltré.es, capturé.es et liquidé.es

Cette situation a continué pendant les dix ans qui ont suivi, ce qui a créé une catastrophe humanitaire qui n’a pas d’équivalent depuis la 2e guerre mondiale. Le bilan aujourd’hui est lourd: 70% des infrastructures pour les services aux civils ont été détruites, les hôpitaux, les stations d’épuration de l’eau, les stations électriques, etc. Alors que des images des centres villes, qui n’ont pas été touchés, circulent pour la propagande spécialement. 

Tout au long de cette période, des régions ont été assiégées en continu. Lorsque le siège de certaines régions était rompu d’autres régions étaient assiégées par la suite. Et jusqu’à très récemment, nous avions environ un million de personnes qui étaient assiégées dans le sud. Vous en avez sans doute entendu parler pour la région de Daraa, qui a été bombardée et où la population souffrait de manque de pain et de nourriture. Les sièges qui ont duré longtemps n’ont pas eu d’équivalents dans l’histoire, car même les Nazis ne bombardaient pas les hôpitaux et laissaient les soins accessibles aux deux parties. 

L’aide humanitaire qui parvenait à être livrée dans les régions assiégées étaient amputée de tout ce qui est médical, médicaments et kits de chirurgie, même suite à des accords signés. 

Lorsque vous entendez dire que la population a été transférée dans le nord c’est que ces résidents des régions assiégées n’avaient pas le choix. Comment feriez vous si vous aviez une famille et des enfants pour rester sans soins? C’est la  façon de faire la plus efficace pour parvenir à ce qu’on peut appeler l’épuration ethnique ou l’évacuation ou simplement vider ces régions de leurs habitants.  Vider des villages et des villes entières tout simplement en les privant d’accès aux soins médicaux.

Cibler des hôpitaux avec des bombardements était systématique, c’est prouvé et ça a fait l’objet de plusieurs rapports. Les médecins ont été ciblé.es, nous avons plusieurs témoignages. Des milliers ont été tués ou blessé.es et aucun ne portait une arme. 3’300 personnes du corps médical ont été arrêtés ou sont disparus forcés. 

Bern, le 30.09.2021

La moitié des Syriens ont été obligés de fuir leur pays ou leur région dont la moitié sont des réfugiés et l’autre moitié sont des déplacés internes. 350’000 morts jusqu’ à aujourd’hui c’est le chiffre qui a été donné en dernier en 2014 par l’ONU et c’est là que le compteur a été arrêté. C’est ce même chiffre qui est apparu il y a quelques jours dans la presse mondiale. Je me permets de vous proposer de le multiplier par deux ou par 3 parce que la tuerie en Syrie ne s’est pas arrêtée et chaque jour les bombardements continuent. 

En dix ans nous avons eu 300’000 handicapés physiques et nous avons dû créer des centres pour les appareiller avec des jambes ou des bras, ceci avec l’aide internationale. Jusqu’aujourd’hui nous n’avons pas fini de les appareiller. Jamais une guerre n’a produit proportionnellement autant d’handicapés. Il faut savoir que les snipers, jusqu’il y a encore deux ou trois ans ciblaient la colonne vertébrale pour créer une paraplégie. Ces snipers étaient entrainés pour créer des handicapés. Les atrocités commises n’ont pas d’équivalent dans l’histoire. Des millions d’handicapés psychologiques, psychiatriques et psycho-sociaux sans oublier qu’on a 300’000 orphelins. 600 des familles qui s’occupent d’une partie de ces orphelins sont soutenues par l’UOSSM suisse , à la frontière de la région d’Idleb. Nos centres de soutien pour les cas psychiatriques et psycho-sociaux ne sont absolument pas suffisants pour cette catastrophe. Tous les Syriens réfugiés, déplacés internes ou même ceux qui se trouvaient déjà à l’extérieur de la Syrie depuis longtemps sont traumatisés.

Concernant le COVID, pour la région du nord-est de la Syrie sous contrôle des forces kurdes et zone d’influence des américains, il y a 1.1 million d’habitants et le nombre de doses arrivées dans cette région pourtant accessible est de 17’500. Le taux de vaccination est inférieur à 1 pour mille. Dans le seul nord ouest de la Syrie, nous comptons 50 à 100 morts par jour et la vaccination est quasi inexistante. Les 300 à 400 000 premières doses arrivées en Syrie sont toutes allées à l’armée.

Si il y a une situation grave c’est celle dans la région controlée par le régime. J’ai de la famille là-bas et ils ne savent pas comment obtenir du pain. Ce mois, en 17 jours, plus de 70’000 syriens ont quitté la Syrie. Le chanceux est celui qui quitte le pays, 45% sont allés en Egypte qui a ouvert la frontière et c’est pour leur survie qu’ils partent. 

J’espère qu’à court terme, on  pourra recevoir des doses de vaccin dans la région du nord syrien. Arriver à 50 à 100 morts par jour, pour une population de 4 millions d’habitants, c’est  une véritable catastrophe. 

A moyen terme, on espère que la Suisse soutiendra des positions qui vont dans le sens d’empêcher la transformation de la Syrie en une 2e Corée du nord, ce qui serait une catastrophe pour toute l’Humanité et pas seulement pour la Syrie.


Situation Humanitaire et Politique en Syrie: Témoignages au Palais Fédéral (1/4 M. Karkoutly)

Situation Humanitaire et Politique en Syrie: Témoignages au Palais Fédéral (2/4 M. Darwish)

Situation Humanitaire et Politique en Syrie: Témoignages au Palais Fédéral (4/4 I. Malki)

Situation Humanitaire et Politique en Syrie: Témoignages au Palais Fédéral (2/4 M. Darwish)

Quatre intervenant.es syrien·nes, engagé.es dans la défense des droits humains du peuple syrien, étaient présent·es au Palais fédéral jeudi 30 septembre 2021, à l’invitation du parlementaire Christian Dandrès, pour témoigner de la situation humanitaire et politique en Syrie, et parler des procès menés en Europe contre des responsables de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité en Syrie. Les conséquences terribles du COVID ont aussi été au centre de la discussion. Dix ans après le début du soulèvement populaire, les activistes de la société civile et la population civile résistent toujours face à un régime dictatorial et criminel. 

Les intervenant·es sont selon l’ordre d’intervention: 

Mariana KARKOUTLY, juriste syrienne exilée en Allemagne, enquêtrice pour la poursuite des crimes commis en Syrie depuis 2011

Mazen DARWISH, avocat syrien exilé en France, fondateur et président du Centre syrien pour les médias et la liberté d’expression

Tawfik CHAMAA, médecin suisse d’origine syrienne, membre fondateur de l’Union des Organisations de Secours et Soins Médicaux (UOSSM) 

Ibraheem MALKI, avocat et activiste syrien exilé en Suisse, membre de la Commission de défense des détenus d’opinion arrêtés à la suite de l’arrestation des membres de la déclaration de Damas en 2006 et membre du Centre syrien pour la justice et pour l’obligation de rendre des comptes.

Les interventions ont été traduites en français par FSD et sont publiées ci-après.

Intervention de Mazen Darwish, 2/4

Je remercie ma collègue Mariana de nous avoir rappelé quelques femmes syriennes d’exception, et je suis fier de connaître la plupart d’entre elles, dont ma collègue Razan Zaitouneh.

La source de ma fierté pour ces femmes n’est pas que nous partagions la même nationalité syrienne, mais le fait que malgré la diversité de nos affiliations sectaires et ethniques, et même de nos positions politiques, nous avons tou.tes pu participer ensemble au rejet du régime  tyrannique pour essayer d’atteindre la démocratie en Syrie.

Les efforts d’un groupe de femmes, en particulier les victimes, nous ont permis en tant que défenseurs des droits humains et en tant qu’organisations civiles syriennes et internationales, d’essayer d’obtenir justice par le biais des tribunaux européens en utilisant la compétence universelle. Ceci a été le cas pour les procédures lancées en France, en Allemagne et en Suède suite à l’utilisation d’armes chimiques.

Razan Zaitouneh était à Douma (ville de la Ghouta de Damas), avec l’équipe de travail du VDC (Centre de documentation des violations), lors de l’attaque chimique d’août 2013. La présence des victimes arrivées en Europe et leur courage nous ont permis de lancer la procédure.

L’utilisation d’armes chimiques, au 21e siècle, s’est malheureusement produite et s’est répétée des centaines de fois contre des civils.

Bern, 30.09.2021

L’une de mes connaissances, vivant dans les zones contrôlées par le régime à proximité des zones de la Ghouta, est une personne très éloignée de mes positions politiques et de celles en faveur des droits humains. Cette personne veut simplement vivre en paix. Mais cette personne m’a dit qu’elle était heureuse que notre centre se soit impliqué dans la procédure contre les responsables de l’utilisation d’armes chimiques dans la Ghouta. Ce fût une surprise pour moi et je lui en ai demandé la raison, surtout qu’elle n’avait jamais exprimé de prise de position contre le régime, ni aucune opposition. Sa réponse a été que si le vent avait tourné ce jour-là,  le gaz chimique aurait pu atteindre sa maison et tuer sa famille. Pour cette personne,  ce régime représentait simplement une menace pour l’humanité et pour tous les gens, quelles que soient leurs affiliations sectaires, ethniques et politiques. Les armes utilisées par le régime contre les civils, comme les armes chimiques et les barils d’explosifs ne faisant aucune distinction entre les loyalistes et les opposants au régime.

Lorsque nous utilisons les outils disponibles pour obtenir justice, notre motivation n’est pas la vengeance, ça n’est pas non plus parce que nous sommes des victimes de  la torture ou à cause de la perte de ceux que nous aimions. Au contraire, nous voulons la paix et nous voulons un avenir sûr pour nos enfants afin qu’ils ne vivent pas la même expérience que nous avons vécue. Mais comment parvenir à une paix durable ?

Tout accord politique entre les parties du conflit, sans tenir compte de la question de la justice, de la responsabilité et des droits des victimes, ne sera qu’un cessez-le-feu. Un tel accord ne fera pas la paix et ne sera pas durable. Sans justice, sans responsabilité, et sans parvenir à une véritable transition politique, un tel accord se résumerait à donner du temps aux parties en conflit, et au régime en particulier, pour recharger leurs armes et pour préparer  une nouvelle guerre motivée par la vengeance, et à cause de l’absence de justice.

Je fais partie des réfugiés en Europe et je suis reconnaissant d’être maintenant en sécurité, mais je souhaite sincèrement pouvoir retourner un jour dans mon pays pour reprendre ma profession, mon bureau, mon pays, la langue que je maîtrise et retrouver les régions que je connais. Mais aujourd’hui, nous sentons, nous les réfugiés, qu’on attend de nous de retourner dans une Syrie toujours dirigée par le même régime qui a causé notre fuite, avec la domination des mêmes services de sécurité qui nous ont arrêtés; et je souligne que ma dernière arrestation a duré environ quatre ans.

Si vous avez entendu parler des photos de César (images des corps des détenu.es mort.es sous la torture), elles sont bien réelles, et j’aurais pu faire partie de ces photos et j’ai été le témoin direct de ces exactions. C’est pourquoi, quand on envisage aujourd’hui de nous renvoyer sous le même régime, avec les mêmes appareils sécuritaires, avec les mêmes conditions… Pour moi, ce serait  donner à notre tueur une autre chance de nous tuer. Et comme malheureusement la première fois il n’a pas pu nous éliminer, on nous demande cette fois d’emmener nos enfants avec nous. Je ne pense pas que ce soit juste ou acceptable.

Si nous voulons vraiment que les réfugiés puissent rentrer en Syrie, nous devons nous assurer qu’il y ait une vraie transition politique et qu’il y ait justice et responsabilité en Syrie.

Nous voulons également la justice et la responsabilité afin d’éliminer le terrorisme, et nous avons souffert du terrorisme et de l’extrémisme, et nous sommes contre le terrorisme et l’extrémisme en Syrie. Mais je ne pense pas que l’utilisation des moyens militaires pour éliminer le terrorisme et l’extrémisme soit la bonne méthode. La même erreur a été faite en Irak en 2006 où les États-Unis et leurs alliés ont formé une coalition internationale et ont bombardé al-Qaïda et tué al-Zarqawi sans justice, sans  principe de responsabilité, sans garantir la démocratie et sans le développement du pays en parallèle. Ce n’était pas la bonne méthode, car en quelques années l’Etat islamique a émergé.

Si nous allons en Syrie pour combattre le terrorisme de la même manière, en utilisant uniquement des moyens militaires, tout en maintenant une dictature sectaire au pouvoir et sans obtenir justice et  satisfaction pour les victimes, alors nous instaurerions l’émergence d’un nouveau groupe terroriste avec un nouveau nom, non seulement en Syrie mais en Europe aussi. 

Ces organisations terroristes ont besoin d’un oxygène particulier pour survivre. Leur oxygène c’est les personnes et les jeunes qui ressentent l’injustice, la persécution, le manque d’intérêt et qui ressentent le désespoir de la justice et de la loi. Ces personnes là sont  les plus susceptibles de devenir des loups solitaires et d’aller vers l’extrémisme.

Je vais évoquer ici les « élections » présidentielles et la restauration de la légitimité en Syrie… 

Mon expérience des élections c’est celles de 2014 que j’ai vécu en Syrie. Nous étions environ 8000 personnes détenues dans une prison civile, et nous avons été traduits devant le tribunal du terrorisme pour des accusations de terrorisme, par le régime. Nous étions 8000 personnes absolument opposées au régime.

Le résultat des « élections démocratiques » de 2014 au sein de notre prison a conclu que 99,8% des opposants que nous étions « ont élu » Bachar al-Assad! C’est ça les élections sous le contrôle du régime Assad et c’est ça les élections qui se déroulent au Moyen-Orient sous les dictatures.

Les civils de l’intérieur de la Syrie, de Deraa à Idlib, ont largement démontré, par la poursuite des manifestations, que les élections de mai 2021 n’ont eu aucune forme démocratique et n’ apportent donc aucune légitimité à aucune autorité politique.

En effet, ces Syriens qui pour la plupart sont à l’intérieur du pays, s’accrochent toujours à nos revendications de justice et de démocratie. Et nous sommes surpris de voir qu’ils ne sont pas fatigués, eux qui sont à l’intérieur de la Syrie, alors que  nous  à l’extérieur le sommes.

J’ai un seul ami suisse. Mon ami est fier que la Suisse puisse accueillir la rencontre de Biden et Poutine, les présidents des deux pays les plus puissants du monde. Il est aussi fier de l’équipe nationale de football qui a fait des progrès remarquables récemment, et surtout, il est fier que la Suisse soutienne financièrement des organisations concernées par la justice en Syrie, comme la nôtre….

Nous espérons que vous préserverez la fierté de mon ami et que les positions politiques suisses et l’argent des impôts n’iront pas aux criminels de guerre ni aux mauvaises orientations.


Situation Humanitaire et Politique en Syrie: Témoignages au Palais Fédéral (1/4 M. Karkoutly)

Situation Humanitaire et Politique en Syrie: Témoignages au Palais Fédéral (3/4 T. Chamaa)

Situation Humanitaire et Politique en Syrie: Témoignages au Palais Fédéral (4/4 I. Malki)