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Il y a 10 ans, le grand rassemblement pacifique de la place de l’Horloge à HOMS a été réprimé dans le sang!
Mémoire de la révolution
FSD re-publie ici un article d’avril 2014 relatif à ce rassemblement populaire en 2011. Pour que la mémoire de la révolution syrienne reste vivante.
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Homs subit ces jours une opération militaire effroyable sur la ville assiégée depuis deux ans. Après l’assassinat du père Francis qui avait choisi de rester avec la population affamée, le régime a entrepris de niveler Homs assiégée et d’exterminer jusqu’ aux derniers habitants. Leur tort aura été d’avoir demandé la liberté, la dignité, la démocratie et la justice sociale. Ces valeurs que vous prétendez les vôtres. Les syriens avaient cru un moment que l’occident est une terre de valeurs et que l’ONU en est le gardien, quelle erreur! L’ONU n’est que l’observateur paralysé des crimes mafieux perpétrés par ses propres membres sous son nez et glorifiés sur ses bancs sous le nom de lutte contre le terrorisme. Son rôle se limite aujourd’hui à préparer les excuses qu’elle présentera dans 20 ans, comme pour le Rwanda.
Pendant ce temps, aujourd’hui, même les quartiers de Homs qui sont restés sous contrôle du régime mais qui avaient participé aux protestations pacifiques subissent des bombardements de mortiers massifs et quotidiens. Les snipers du régime y ciblent tous ceux qui osent encore mettre un pied dehors. Une ambiance de guerre intense règne à Homs. Une guerre qui oppose le régime Assad et ses associés russe et iranien, et ses milices étrangères (du Liban, de l’Irak, de l’Iran, de l’Afganistan, de la Grèce, et bien d’autres) à la population de Homs.
L’association FemmeS pour la Démocratie répond ici à l’appel des activistes de Homs et organise un rassemblement le 18 avril 2014 à 16h00 à la place du Port à Ouchy pour commémorer la journée de 18 avril comme journée internationale de Homs, mais aussi pour manifester notre solidarité avec Homs qui subit aujourd’hui une opération militaire sans précédent.
Cette journée commémore le sit-in du 18 avril 2011 où les habitants de Homs, de tous âge et de toutes appartenances, se sont rassemblés pacifiquement sur la place de l’Horloge. Malheureusement, ce rassemblement s’est terminé très tard la nuit par les tirs des forces de « sécurité » sur les manifestants. Cette nuit là, beaucoup ne sont pas rentrés chez eux, parce qu’on comptait les morts par dizaines, tout comme les détenus et les disparus.
Ce jour là la souffrance de Homs a commencé ; Homs est devenue une ville blessée, dont les blessures ne cessent d’augmenter. Ce jour là restera à jamais lié, dans la mémoire des Homsis, au massacre de la place de l’Horloge.
Nous avons choisi de partager avec vous un témoignage d’une Homsi sur ce sit-in et un témoignage d’un ancien officier dans l’armée du régime sur la répression meurtrière qui a sévi cette nuit là.
« J’étais au lit, malade, quand le téléphone a sonné. Mon père nous a appelés pour nous informer du rassemblement : « des milliers de gens sont rassemblés sur la place de l’Horloge… Dépêchez-vous pour vous joindre à nous. »
J’ai oublié ma maladie, je me suis habillée rapidement, nous avons préparé quelques panneaux et nous y sommes allés. Nous sommes arrivés au moment de la prière du coucher du soleil. La scène était si incroyable que nous avions les larmes aux yeux.
La place était pleine de citoyens de toutes les religions et de toutes les classes sociales. J’ai été étonnée de voir des gens que je ne pensais pas rencontrer à cette occasion. J’étais si heureuse et fière. Je ne peux pas oublier les moments où les gens nous ont ouvert des passages pour nous les femmes pour atteindre l’Horloge.
Soudainement, mon père a paru fatigué, avec un visage pâle. J’ai demandé de l’aide. Trois médecins l’examinaient sur la place quand mon frère est arrivé. Nous nous sommes inquiétés pour mon père, mais il nous a demandé de rester avec les gens au sit-in, tandis qu’il retournait à la maison avec ma mère, répondant aux instructions des médecins.
Malheureusement, notre bonheur a été troublé quand ma mère nous a appelé pour nous informer que mon père devrait être hospitalisé. Il avait un caillot. Ces émotions lui ont causé une crise cardiaque. Il a été choqué d’entendre les gens chantant d’une seule voix pour la liberté et pour la chute du régime: « Le Peuple veut renverser le régime ». Son coeur ne pouvait pas supporter un tel bonheur. Il a eu besoin de chirurgie.
À 2h00 du matin, les tirs des mitrailleuses ont commencé. C’était la première fois de ma vie que j’entendais des tirs… Je suis devenue folle. Inconsciemment je hurlais en pleurant: « ils sont morts… Ils sont tous morts… Ils les ont tués ». Les gens s’enfuyaient en courant dans les rues. Ce jour est devenu une tragédie dans les coeurs des citoyens de Homs.
Je suis restée éveillée toute la nuit, je priais pour que les Homsis soient saufs avant de recevoir la pire nouvelle : mon cousin Wassim a été tué. La meilleure personne de la famille est décédée.
Le choc de cette tragédie était très fort, mais il nous a rendus encore plus forts.
Et voilà, cette journée du 18 avril 2011 était la meilleure journée de ma vie et elle est devenue la pire!!! Que l’âme de mon cousin Wassim Tammam Kroma reste en paix. ».
Témoignage du Général Ahmad Tlass [extrait] :
« Il s’était produit exactement la même chose à Homs, provoquant la mort d’un grand nombre de citoyens pacifiques dans des conditions identiques.
Des jeunes s’étaient rassemblés, le 18 avril, pour un sit-in au centre de la ville, au pied de la vieille horloge. Tous les responsables concernés par la sécurité se trouvaient à la Direction de la Police, à proximité immédiate. Des émissaires sont allés négocier avec ceux qui occupaient les lieux pour les convaincre d’évacuer la place. Ils étaient quelques milliers, entre 5 000 et 10 000 peut-être. Ils ont refusé de partir. Vers le milieu de la nuit, nous avons tenu une réunion avec le général Mounir Adanov, qui était déjà là, pour décider de ce qu’il y avait lieu de faire. On a à nouveau demandé aux jeunes de quitter la place en empruntant les rues qu’ils voulaient. Mais, alors que les discussions se poursuivaient, des agents des moukhabarat jawiyeh – le Service de sécurité de l’Armée de l’Air – qui avaient été dépêchés depuis Damas pour « disperser des voyous », ont commencé à mitrailler la foule. Ils ont fait des dizaines de morts. Ils obéissaient à l’ordre de tirer à vue qui leur avait été donné par de hauts responsables de la sécurité. Il s’agit encore une fois de ces officiers invisibles aux regards, mais suffisamment puissants pour donner directement des instructions à des éléments à leur dévotion. Certains de ces éléments sont des agents des différents Services de renseignements. Mais ils peuvent être aussi des fonctionnaires d’autres ministères, comme celui de l’Education. Il s’agit ni plus ni moins que, comme je l’ai déjà dit, d’un état dans l’Etat. »
FSD
Le Régime Assad c’est ça: 5
15.01.2013: massacre sectaire à al-Haswiya commis par les forces du régime syrien
Résumé et témoignages traduits par FSD d’après le rapport complet* publié en anglais et en arabe par le Réseau Syrien des Droits de l’Homme RSDH en mai 2018, pages 4-9 :
Résumé
Le village d’al-Haswiya, situé à 5 km au nord de Homs, comptait 5’000 habitants au début de la révolution. Suite à la répression armée du soulèvement populaire à Homs, le village a accueilli des centaines de personnes déplacées internes de la vieille ville de Homs et du quartier al-Waer. Bien que ce village fasse partie des régions de Homs sympathisantes du soulèvement, il était resté à l’écart de l’opposition armée et des combats. Al-Haswiya a pourtant été le théâtre d’un massacre collectif à caractère sectaire perpétré par les forces du régime syrien et ses milices, entraînant la mort d’au moins 108 civils de la communauté musulmane sunnite, dont 25 enfants et 17 femmes (108 cas sont documentés).
Témoignages
Samira, une institutrice du village, dit: « Le jour du massacre, nous avons entendu parler d’activités militaires dans les environs. Craignant d’être arrêtés, mon père et mes frères se sont dirigés vers les champs, car ils étaient connus pour leur opposition au régime syrien depuis le début de la révolution. En dépit des activités militaires, j’ai décidé de me rendre à l’école du village où je travaille et j’ai vu des chars, des véhicules militaires et des combattants. Certains combattants portaient des drapeaux sur lesquels était écrit: «O Hussein**» et d’autres étaient affiliés à la Garde Nationale. Je pouvais distinguer certains de leurs dialectes. Certains d’entre eux parlaient en persan. ».
Elle ajoute: « Les soldats sont entrés dans l’école et l’ont inspectée. Ensuite, ils nous ont encerclés. Nous avons alors entendu des tirs intermittents et nous avons remarqué des incendies et de la fumée qui montait. C’était vers 11h00. Après, j’ai appelé mes frères. J’ai pu entendre le son des balles et c’était proche d’eux. ».
«Vers 14 heures, nous avons été autorisés à quitter l’école. Je suis rentrée chez moi. Sur le chemin, j’ai entendu des gens crier et pleurer. J’ai vu le cadavre d’une femme enceinte avec son fils. Son fils était l’un de mes élèves à l’école. Les deux cadavres étaient défigurés et avaient été jetés au milieu de la rue. Le cadavre de l’enfant n’avait plus d’yeux. Cette femme était venue dans notre école et elle avait insisté pour ramener son fils à la maison. Elle l’a mené à la mort». Samira a déclaré avoir vu des cadavres suspendus à des arbres et avoir vu des têtes décapitées, des enfants de moins de 20 ans. Elle a ajouté avoir vu plusieurs maisons dont les bosquets avaient été brûlés: «Je suis arrivée à notre ferme. Tout avait brûlé. Les cadavres de ma mère, de mes soeurs et de mon neveu étaient là. J’ai vu les bouteilles qu’ils avaient utilisées pour brûler les cadavres et les maisons. Je me souviens encore de l’odeur de la chair en train de brûler. Ils s’étaient vengés contre ma mère et mes sœurs, simplement parce que mes frères et mon père s’opposaient au régime. ».
« Certains des survivants qui ont pu se cacher dans les bosquets et qui ont survécu au massacre m’ont raconté les détails du meurtre de ma famille et comment leurs cadavres ont été brûlés. Ils m’ont dit que ma mère avait essayé de défendre mes sœurs et avait insulté un policier et l’avait agressé. C’est pourquoi ils ont riposté plus sévèrement contre ma famille ».
Abu al-Baraa, qui a pu fuir vers la périphérie du village alors que le régime syrien y pénétrait de force, raconte: «Je me suis caché dans un conduit d’eau toute la journée. Je suis rentré au village à la nuit tombée et j’ai vu ce qui s’était passé. J’ai vu des dizaines de femmes qui s’étaient rassemblées près de l’abattoir, près de la rivière Oronte. Elles essayaient de fuir car elles craignaient un autre massacre. Je me suis faufilé dans les maisons qui sont près de la mienne. Je suis entré dans une maison de la famille Khazzam où se trouvaient 18 cadavres. Tous étaient des femmes et des enfants. L’une des victimes était un bébé que j’ai trouvé à l’intérieur du poêle dans une chambre. Parmi les victimes, il y avait une femme enceinte dont le cadavre était criblé de balles ».
« La plupart de mes voisins ont été exécutés. La famille Za’rour, à elle seule, a eu 72 victimes, tandis que la famille Ghaloul a perdu 22 de ses membres, sans compter les victimes des familles al-Sahou, al-Mahbani, Dyab, Roumiya, Arafat, al-Tayyar et al-Qabouni. Tous les meurtres visaient des familles sunnites, tandis que les familles chiites et chrétiennes étaient épargnées. Certaines des personnes qui ont pris part au massacre et à cet abattage appartenaient à la famille chiite: al-Halabi, qui vit avec nous dans le même village. ».
Selon Abu al-Bara, la plupart des personnes arrêtées étaient des hommes qui sont restés dans le village: « Environ 200 personnes ont été arrêtées. Certains d’entre eux ont été libérés, tandis que d’autres se trouvent toujours dans des centres de détention. Il y a eu des pillages. Ils ont saisi des maisons et des voitures et j’ai appris que des viols avaient eu lieu dans la rue al-Basatin et à proximité de l’abattoir. ».
« Certains des survivants m’ont dit que le village avait été envahi par les Shabiha du régime, y compris les Alaouites et les Chiites, et que des combattants parlaient une langue inconnue ».
Mohammad est un combattant de l’opposition armée dans la banlieue nord de Homs et sa famille vit dans le village d’al-Haswiya. Mohammad déclare: «Notre village était complètement entouré de points militaires du régime. Il n’y avait qu’une sortie vers la banlieue nord de Homs. Nous avons essayé de faire de ce village un refuge sûr pour les personnes qui ont subi le déplacement interne. Et nous n’étions pas présents dans le village ».
Mohammad a raconté que sa femme et ses enfants avaient assisté au massacre alors que sa maison était pillée par des milices chiites qui ont battu sa femme et ses enfants et volé les bijoux: « Ma femme et mes enfants ont survécu, mais ils ont abattu mon neveu et mon cousin, ils ont perquisitionné chez ma sœur et l’ont violée devant ses enfants ».
Mohammad a déclaré avoir trouvé des cadavres jetés dans l’Oronte pendant un mois après le massacre. Ces cadavres ont été enterrés dans les villages de la banlieue nord de Homs: « Pas moins de 23 cadavres, dont trois femmes, ont été emportés par la rivière Oronte dans les régions d’al-Dar al-Kabra et de Ter-Ma’la. La plupart des cadavres ont été abattus d’une balle dans la tête, semble-t-il. J’ai pu identifier l’un des cadavres. Il s’appelait Abu Ryad et sa tête avait été brisée à l’aide d’un outil tranchant ».
Um Omar, une résidente du village d’al-Haswiya, a déclaré avoir vu un grand nombre d’hommes armés. Certains d’entre eux portaient un uniforme militaire, d’autres portaient des vêtements noirs et avaient un bandeau sur lequel était écrit «O Zaynab**». Um Omar a ajouté qu’ils transportaient des couperets et des fusils de chasse. De plus, Um Omar a confirmé que la majorité d’entre eux étaient des «Shabiha» (milices recrutées par le régime syrien).
Abu Ammar a déclaré avoir vu un certain nombre de cadavres après le départ de l’armée et des milices chiites du village. Certains des cadavres ont été brûlés, tels que ceux de la famille Ghaloul, qui a subi 17 morts, selon Abu Ammar. Ce dernier a réussi à survivre après avoir fui vers l’un des villages voisins quand il a appris que le village était encerclé: «Ils ont utilisé des fusils de chasse, des mitraillettes et des couperets pour tuer les familles, puis ils ont brûlé les cadavres. Les traces de violence haineuse étaient visibles sur les cadavres. Qui pourrait tuer de cette manière barbare? ».
……..
* Le RSDH a recensé au moins 57 massacres à connotation sectaire depuis mars 2011, dont 50 massacres perpétrés par les forces du régime syrien (voir le rapport complet en anglais).
** Hussein et Zaynab sont des figures de l’Islam Chiite.
Depuis 4 ans, les enfants sont une cible privilégiée du régime Assad
Mémoire de la Révolution
Il y a tout juste quatre ans, le 25 mai 2011, le corps mutilé de Hamza Al Khatib, 13 ans, a été rendu à ses parents.
Il y a tout juste trois ans, le 25 mai 2012, des dizaines d’enfants ont été égorgés à Al-Houla à Homs, les mains attachées.
Les enfants syriens continuent à être la cible du régime Assad dans le silence assourdissant de la communauté internationale, grâce aux délais successifs accordés à ce régime pour continuer ses massacres!!!
Aujourd’hui, plus de 17’000 enfants sont morts en Syrie depuis le début de la révolution, plus de 9’500 sont en détention et risquent de subir le même sort que Hamza al-Khatib (SN4HR)!
En ce mois de mai 2015, deux jeunes de 15 ans, Mahmoud et Mohamad To’emeh, deux cousins originaires de Baba Amr, ont été kidnappés à Homs et ensuite égorgés. Leurs corps ont été retrouvés dans une région pro-régime… Les témoignages laissent penser que les Chabbihas seraient les auteurs de cet acte barbare (Zaman al-Wassel).
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Massacre d’al-Houla, il y a tout juste trois ans, le 25 mai 2012:
Nous avons choisi de reproduire ici le témoignage de l’activiste Hadi Abdullah sur Al-Jazeera du 25 mai 2012. Hadi racontait son désarroi devant l’inertie des observateurs de l’ONU sous la direction de Kofi Annan pendant que les massacres se déroulaient à al-Houla. Nous rappelons ici que des familles entières ont trouvé la mort ce jour là de la façon la plus barbare (bilan : 130 morts dont 49 enfants). Vous trouverez également ici l’article paru dans Le Monde le 30 mai 2012 avec des témoignages des enfants rescapés:
Témoignage de Hadi Abdullah:
“Three massacres were committed in Hawla City, and more are being committed now 76 martyrs are confirmed in Hawla alone, and more than 300 wounded. Hawla city has been under shelling for more than 12 hours.
Shooting started at a demonstration with bullets and artillery, and the shelling has not stopped for more than 12 hours. Hundreds of missiles hit the civilian homes, causing hundreds of them to burn.
Assad thugs (Shabeeha) supported by the security gangs attacked the houses located at the edges of Hawla city, and committed field execution against the civilians, they slaughtered them with knives… most of the killed are children.
I called up to the UN monitors and begged them to come to Hawla , they promised to come tomorrow morning. I asked the UN monitors to stop the shelling for only half an hour.
The UN monitors are sleeping now, while the massacres are being committed.
We used to count the number of martyrs, but now, we are counting the number of families slaughtered. The whole world helps in killing the Syrians, not just the Syrian regime.
We have many martyrs and wounded that we could not reach because of the continuous shelling and the cut-off of electricity.
We are still discovering more massacres in the city. The Syrian regime is now killing under the nose of the whole world and in the name of the UN monitors.”
The Source:
https://www.youtube.com/watch?v=qUGbdaZi8O0&feature=youtu.be
Depuis un an, Homs est une grande blessure dans le coeur des Syriens insurgés
Mémoire de la Révolution
FSD re-publie ici un article sur Homs en mémoire de cette ville martyre qui a été évacuée il y a tout juste un an… Homs a été reprise par le régime Assad suite à deux ans de famine et de siège imposés par ce régime barbare…Homs est aujourd’hui une grande blessure dans le coeur des Syriens insurgés!
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Depuis plus de deux ans, Homs, qui résistait au siège, aux bombardements, à la faim et au manque atroce de soins médicaux, est devenue le symbole de tout un peuple en révolte.
Aujourd’hui, l’évacuation des révolutionnaires de Homs assiégée, suite à l’accord signé entre ces derniers et le régime, supervisé par l’ONU, avec la présence de l’Iran et de la Russie, signifie la fin du siège et la mainmise du régime sur le centre de Homs et des quartiers adjacents. La présence de l’Iran et de la Russie dans ces pourparlers montre toutefois que cette résistance des Homsis, avec leurs moyens très modestes, face à l’armée d’un « Etat » , qui a duré plus de deux ans, était de taille pour le régime. En effet, ce dernier n’a jamais pu mettre fin au siège militairement et il a dû finalement accepter de laisser sortir les révolutionnaires armés, ainsi que les blessés.
Depuis le début du cessez-le-feu à Homs le 1er mai 2014, les Homsis vivent dans un calme apparent, lourd, étouffant, oppressant… Eux qui n’en pouvaient plus de l’ambiance de guerre et du bruit insoutenable des raids aériens, des scuds, des mortiers et des tirs de mitraillettes, se retrouvent soudainement écrasés par ce calme tant attendu, mais qui signifie pour eux la fin provisoire de la légende de Homs, ville symbole de la résistance absolue. Ils ont l’impression d’avoir momentanément perdu leur ville, cédée au régime soutenu par l’Iran et la Russie. Et ce sentiment est d’autant plus pénible que le régime et ses alliés tentent de mettre en place un changement démographique en important des chiites étrangers pour repeupler les quartiers de Homs.
Aujourd’hui, les Homsis sont tristes. Où qu’ils soient ils ont les larmes aux yeux et cette souffrance est encore plus dure pour ceux qui n’ont jamais quitté la Homs assiégée. C’est pourquoi nous avons choisi de traduire deux postes publiés sur la page facebook de Wiam Bedirxan Simav, une caméra-woman de Homs assiégée :
« Depuis le matin je me fragmente sur les pierres des rues et des quartiers de Homs…
Je ramasse les larmes de mon objectif, qui était devenu mes yeux, en la peignant comme un enfant qui a vieilli trop tôt.
La batterie est épuisée mais la douleur n’a pas pris fin.
La braise de l’attente n’a pas pris fin.
La peur, les incertitudes, le regard tourné vers le début d’un chemin inconnu jusqu’à cet instant.
Personne ne sait vers quel destin on se dirige, ni quand.
Les interrogations nous dévorent et ne laissent rien de ce qui restait de nous… Rien ! »
De Homs assiégée, mortifiée par les braises de l’attente de l’univers et par sa lâcheté amère, le 5 mai 2014.
« Adieu mes chers, adieu à vos âmes.
Pardonnez-nous Martyrs de Homs.
Nous n’avons pas le droit d’emporter des anges avec nous.
Que vos os puissent nous pardonner lorsque les chiens du régime ouvriront vos tombes »
De Homs assiégée, marquée par les adieux de l’univers et les fouets de la lâcheté amère de cet univers, le 6 mai 2014.
FSD
Noura Al-Ameer entre en grève de la faim pour dénoncer le déni de justice dont est victime le peuple syrien
Chronique de la Syrie
Depuis le 29.12.2014 Noura Al-Ameer, vice présidente de la coalition nationale syrienne, fait la grève de la faim en solidarité avec les centaines de prisonniers de conscience de la prison centrale de Homs. Ces derniers ont commencé leur grève de la faim le samedi 27 décembre 2014 pour dénoncer les injustices dans le traitement légal de leurs dossiers d’une part mais surtout pour revendiquer leur libération. Certains ont été condamnés sans même être présentés devant un juge, d’autres ont reçu des condamnations démesurées par rapport aux accusations qui se limitaient à la participation aux protestations pacifiques à Homs.
Noura Al-Ameer a elle-même vécu la détention en Syrie, dont une partie dans la prison centrale de Homs, elle a à cette époque participé à deux grèves de la faim dans cette même prison. Elle rappelle que plusieurs actions semblables ont eu lieu dans cette prison, suite auxquelles certains prisonniers sont morts et d’autres ont été privés de leur droit aux soins médicaux. Elle dit : « Il est très regrettable et même honteux que les organisations internationales des droits de l’homme comme les organisations politiques ignorent l’appel des détenus revendiquant leur droits les plus basiques et la justice face aux crimes qu’ils subissent de la part le régime syrien. ». Al-Ameer ajoute « Ma décision de faire une grève de la faim est motivée tout d’abord par ma solidarité avec les détenus de la prison de Homs, mais aussi pour passer un message à tous les détenus en Syrie leur disant qu’ils ne sont pas seuls dans cette souffrance. Mon action est également un message à la communauté internationale disant qu’il est inacceptable de garder le silence sur les conditions de détention inhumaines en Syrie. Elle est aussi motivée par l’injustice que subissent tous les Syriens qui vivent dorénavant dans une grande prison où qu’ils soient. Notre situation à nous autres n’est pas meilleure que celle des détenus à Homs, car tout le peuple syrien vit actuellement dans un monde devenu pour lui une grande prison obscure, où seule la loi du plus fort règne à cause de l’absence totale du soleil de la loi internationale et des droits humains ».
Al-Ameer dénonce l’inaction de la communauté internationale: « Il est nécessaire d’instaurer dès aujourd’hui une surveillance médicale dans les centres de détention et les prisons en Syrie qui sont utilisés comme moyens de pression pour mettre un terme à la volonté du peuple syrien d’exiger le changement du régime dictatorial. Il est urgent de mettre un terme aux crimes du régime Assad à l’encontre des détenus syriens et d’œuvrer pour que l’impunité cesse.»
Elle lance un appel urgent :
- au CICR: pour qu’il supervise la situation médicale et légale des détenus en Syrie,
- à tous les pays qui se proclament défenseurs de la liberté et des droits humains: de prendre une position morale face à la catastrophe syrienne,
- à tous les syriens et à tous les amoureux de la liberté: de se joindre au mouvement de grève de la faim afin d’aboutir à la libération de tous les détenus d’opinion en Syrie.
FSD
Violences à l’égard des femmes en Syrie, 4e partie, Témoignage d’Eman
A l’occasion de la journée internationale de l’ONU pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes une conférence spéciale sur la violence contre la femme en Syrie devait avoir lieu à l’ONU le 25 novembre à 10h00 du matin. Les intervenants prévus étaient Noura AL-AMEER, vice-présidente de la coalition nationale syrienne et responsable du dossier des droits humains, Tarek KURDI juriste syrien en droit international et trois anciennes détenues : Alaa, Kenda et Eman. La conférence devait dénoncer les violences que subit la femme syrienne de la part du régime Assad et de l’Etat Islamique (Daesh). Seule Noura Al-Ameer a pu se rendre à Genève, Alaa a elle été retenue à l’aéroport d’Istanbul et les trois autres intervenants n’ont pas pu obtenir de visa. Pour cette raison, la conférence à l’ONU a dû être annulée. FemmeS pour la Démocratie (FSD) a maintenu la conférence publique organisée le même soir, avec la présence de Noura Al-Ameer. Conférence soutenue par Amnesty International- Groupe Uni Genève, Mouvement pour le Socialisme (MPS), site alencontre.org, SolidaritéS Genève.
FSD publie ici les interventions de cette soirée en 5 parties:
1. Intervention de Noura Al-Ameer; 2. Intervention de Tarek Kurdi, par skype; 3. Témoignage de Alaa, lu ; 4. Témoignage de Eman, lu ; 5. Témoignage de Kenda, lu.
Partie 4/5
Eman, ancienne détenue, de Homs, 30 ans,
“Je me suis impliquée dans la révolution syrienne depuis son début, dans l’action civile et dans les manifestations pacifiques qui ont eu lieu dans le quartier d’al-Khaldia à Homs.
J’ai travaillé dans le domaine des soins médicaux et j’ai participé aux efforts d’aide à la population. J’ai participé à la distribution d’habits, de nourriture et d’argent aux déplacés, aux familles pauvres et aux familles de détenus et de martyrs.
J’ai été arrêtée une première fois le 24 juin 2012 pour une période de 3mois par les Chabbiha (connus actuellement comme “armée de défense nationale”), qui sont en fait des groupes de mercenaires dont le rôle est de réprimer les manifestations civiles pacifiques.
On nous a emmenées vers des destinations et des maisons dédiées spécifiquement à l’emprisonnement des femmes, on ne nous a pas emprisonnées dans les prisons du régime ou dans les centres de détention des services secrets. Les buts de notre détention étaient, comme les gardiens nous l’ont dit, de nous échanger contre rançon, de nous échanger contre d’autres kidnappées, ou de nous violer.
Pendant notre détention nous avons été torturées physiquement et psychologiquement d’une manière inimaginable, que je n’avais jamais pensé pouvoir exister.
Les gardiens utilisaient l’électricité, le harcèlement sexuel, ils nous brulaient le corps avec des cigarettes et de l’eau bouillante. On nous frappait aussi avec des câbles électriques et des tuyaux. Ils ont coupé nos cheveux, ils nous ont violées collectivement et à répétition. Ils ont aussi tenté plusieurs fois de nous noyer dans l’eau. Par deux fois j’ai eu de forts saignements vaginaux. J’étais très effrayée par les voix et les cris des autres détenues qui étaient continuellement et violemment torturées.
Ils ont tué notre humanité, nous avons perdu la volonté de vivre, nous appelions la mort chaque jour. J’ai vu des femmes brutalement déshabillées et violées. Les gardiens les violaient devant nous et les battaient violemment, pour certaines jusqu’à la mort. On laissait alors leur corps dans la même cellule pendant un jour, avec pour conséquence que beaucoup d’entre nous ont tenté de se suicider.
Les gardiens étaient de vrais monstres assoiffés de sang, de revanche et de volonté de tuer. Ils nous donnaient juste assez de nourriture pour ne pas mourir dans la journée.
Des maladies sont apparues parmi les détenues à cause des infections et des blessures laissées sans soins, les poux et la saleté s’ajoutant à l’eau et aux aliments contaminés que consommions ont dégradé notre santé et provoqué de nombreuses entérites.
Lorsqu’on m’a relâchée on m’a mise dans un conteneur d’ordures.
J’ai été arrêtée pour la seconde fois le 3 février 2013 par des brigades armées sectaires non-syriennes, et détenue pendant 10 jours, au cours desquels on m’a volé toutes mes affaires, et l’on m’a battue et fouettée avec des câbles métalliques. »
FSD
Lire aussi les trois premières partie de cet article:
Café littéraire pro-Assad
Chronique de la Syrie
Une annonce nous est parvenue récemment d’un café littéraire organisé par la médiathèque de St-Maurice à l’occasion de ses 40 ans, le 14 juin 2014. L’invité est Houssam Khadour, un « écrivain » et traducteur syrien, ancien détenu qui aurait passé quinze ans dans la prison centrale de Damas et qui a écrit trois livres sur sa détention (solitude, torture, exécution, etc.). L’un d’eux, La charrette de l’infamie, a été traduit en français et édité en Suisse en 2013. Nous nous y sommes rendus.
La salle se remplit d’environ 30 personnes, l’écrivain est présenté par la modératrice. On apprend alors avec étonnement qu’il vient tout droit de Syrie pour ce café littéraire et un autre à Genève. Il remercie ses hôtes pour l’accueil chaleureux et le Flamenco organisés pour son arrivée. Nouvelle surprise, il est lui- même éditeur en Syrie!
La modératrice lit des extraits traduits en français. La traduction est excellente, toutefois vide de toute émotion si l’on compare à d’autres livres d’anciens détenus d’opinion syriens. L’écrivain nous annonce qu’il a écrit ses trois livres pendant ses années de détention, puis les a édités en arabe en 2012, en pleine révolution! C’est étonnant! La réponse semble être qu’à Damas on peut publier ce genre de textes sans problème, preuve en est la vente de ses livres dans les librairies de Damas. « Il ne faut pas croire tout ce qu’on raconte » dit-il.
Viennent ensuite les questions. A la dernière, qui lui demande de lier ses écrits à ce qui se passe en Syrie actuellement, il prend son temps pour prêcher la politique d’Assad :
- « En Syrie, il faut combattre le terrorisme! » Il invite les citoyens à demander à leurs gouvernements de s’unir pour lutter contre le terrorisme… Il oublie que c’est le régime lui-même qui a semé la terreur en Syrie, en libérant certains extrémistes qui sont devenus des leaders de groupes terroristes, épargnés depuis par Assad, qui préfère lui s’attaquer aux civils.
- « Il faut aussi lever les sanctions économiques », car c’est barbare d’appliquer de telles sanctions qui sont contraires à la loi internationale… Mais oui! Bien sûr! Mais est-il humain et approuvé par cette même loi d’affamer son peuple, d’arrêter et de torturer des enfants, de violer les femmes et de détruire les habitations des civils ?
- « Il faut aussi arrêter l’industrialisation des réfugiés » et leur permettre de rentrer en Syrie… Vraiment ? Et qui a détruit leurs maisons, violé leurs femmes et leurs filles, et massacré leurs enfants ?
Et là on annonce la fin de cette rencontre, sans possibilité de contradiction.
Nous avons mené quelques recherches pour découvrir que Houssam Khadour, originaire du village de al-Qirdaha, le même qu’Assad, a le poste de décideur de l’association de traduction de la fédération des écrivains arabes, entité liée au régime de Damas. Il a semble-t-il pu publier un livre traduit en arabe en 1992, pendant sa détention! S’il est possible d’écrire dans certaines prisons syriennes, il est à peu près impossible d’en sortir ses écrits et encore moins de les publier. Aujourd’hui H. Khadour écrit dans la presse officielle du régime Assad !
Quelle déception! La Suisse, pays défenseur des droits humains offre une tribune à un propagandiste du dictateur le plus sanguinaire de l’histoire récente. On lui obtient un visa (et là déjà il y aurait beaucoup à dire), on lui paie sans doute son billet d’avion et on lui réserve un accueil chaleureux en Suisse, mais avant ça on édite la traduction de son livre tout en sachant qu’il est lui-même éditeur au service du régime syrien ! La traductrice, binationale française et suisse, est l’épouse de l’ambassadeur suisse à Damas rappelé en août 2011.
Faut-il rappeler une fois de plus que c’est l’aviation du régime Assad qui a détruit 85% de la ville de Homs, que le pillage de Homs assiégé a été orchestré par le régime, que la population du vieil Homs a été assiégée et affamée pendant plus de deux ans, que 40% de la population syrienne est aujourd’hui déplacée à l’intérieur ou vers l’extérieur du pays. Et les mêmes destructions ont eu lieu à Deir-Ezzor, à Damas-campagne, Alep, Daraa et Idleb.
Faut-il rappeler aussi que la torture dans les centres de détention en Syrie est abominable et prouvée et qu’elle n’épargne ni les enfants, ni les femmes; que dix mille enfants sont détenus en Syrie et y risquent leurs vies et que quinze mille enfants ont déjà trouvé la mort depuis 2011, qu’un demi million de syriens ont été blessés par les obus, barils d’explosifs et autres armes des forces du régime.
A ceux qui ne veulent pas venir en aide au peuple syrien, qui se soulève contre un régime barbare, nous disons: respectez au moins notre souffrance et ayez la décence de ne pas offrir une tribune aux prêcheurs du boucher de Damas ! On a déjà vu défiler les figures chrétiennes pro-Assad, comme la mère Agnès, venue en Europe prêcher le message d’Assad. Aujourd’hui on a assisté à une manipulation sur le thème de l’« ancien détenu repenti», ce serait grotesque si la réalité syrienne n’était pas aussi inhumaine.
FSD